J'ignorais alors que j'ouvrais aussi la malle aux souvenirs....
Et ce fut une longue manipulation, une longue énumération, une belle émotion :
ce bleu rayé pour la chemise de mon frère,
ce fleuri pour une petite robe d'été de bébé,
celui-ci acheté pour un cadeau de naissance,
celui-là donnée par belle-maman.
Et cet autre rapporté des USA, il y a 17 ans déjà...
çà c'est sûr: acheté à la mercerie de Draveil !
ce ton fané donné par ma voisine autour d'un thé...
Et les tissus furent choisis, harmonisés
puis déchirés en longues bandes
et noués, côte à côte petit à petit,
doucement pour laisser aux souvenirs la possibilité de revenir....
Je refaisais ainsi le geste des pionnières américaines
qui avec du vieux recrééaient du neuf !
Heureuse pluie
Et Emilie en plus a dit:
" Cela sent comme en Corrèze ..."
La terre exalait l'odeur de champignons
Cela me renvoyait directement à ce texte que je venais de relire :
C'est un large buffet sculpté, le chêne sombre,
Très vieux, a pris cet air si bon des vieilles gens ;
Le buffet est ouvert, et verse dans son ombre
Comme un flot de vin vieux, des parfums engageants ;
Tout plein, c'est un fouillis de vieilles vieilleries,
De linges odorants et jaunes, de chiffons
De femmes ou d'enfants, de dentelles flétries,
De fichus de grand-mère où sont peints des griffons ;
- C'est là qu'on trouverait les médaillons, les mèches
De cheveux blancs ou blonds, les portraits, les fleurs sèches
Dont le parfum se mêle à des parfums de fruits.
- Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires,
Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis
Quand s'ouvrent lentement tes grandes portes noires.
Arthur Rimbaud (1854-1891),
Poésies, 1870.
8 commentaires:
AH ! le pouvoir des odeurs ! Moi aussi souvent je me dis "ça sent les champignons, comme lorsque je me promène seule au fond des bois en Corrèze... Ca me manqueeeeeeeeeeeee !
Ce billet a tout, tout , pour me plaire... tous ces bouts de tissus porteurs de souvenirs... cette couronne ... l'évocation de Rimbaud dont je me gargarisais dans mon jeune temps... ces odeurs... moi il m'arrive souvent de dire :" cela sent comme en Lozère..." ces vieux meubles pleins de trésors... cela m'a aussi fait pensé au poème du buffet, d'Albert Samain... heureusement que tous les billets ne sont pas aussi merveilleux car on y passerait sa vie !
Merci.
quand je dis "tous les billets", je parle de ceux de tous les blogs où l'on passe.
Bonsoir
elle est belle ta couronne et ton messsage me va droit au coeur car comme toi, je ramasse les tissus partout ou je passe et j'aime beaucoup me remémorer les personnes qui me les ont donné, leur utilisation ....les endroits où je les ai acheté ou les cadeaux..
Alors comme ça toi aussi tu va à la mercerie de Draveil ..
J'aurai aimé fait l'échange avec toi pour les 100 ID , mais j'ai regardé ma collection et je les ai déjà... un autre échange , une autre fois..
à bientôt
manny
ouh la la les fôtes, excuses-moi c'est la précipitation...
ce poème je l'ai récité des dizaines de fois!!!souvenirs!!!souvenirs!!!mais dis donc ma belle t'aurais bien des petits restes mimis de tissus pour rhabiller mes santons????
bz bz
Je suis restée réveuse devant ce buffet aux parfums de Grand Mère qui, sans bruit, sans cri, réveille en nous les moments intenses. Mon buffet à moi il me vient de ma grand mère ; je l'ai récupéré au vol avant la salle des ventes. Il n'est pas très pratique, j'y ai mis de la vaisselle mais en lisant ces mots, j'ai envie d'y placer des choses bien plus précieuses.
C'est ce qui est agréable, créer à partie de bouts de rien! Bravo pour ta couronne!
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